Lutte contre la pédophilie : Les avancées de l’Assemblée plénière des évêques de France de novembre 2019

10 novembre 2019

Déclaration du samedi 9 novembre 2019

Dans sa détermination à lutter contre la pédophilie, l’Eglise de France franchit un cap significatif lors de l’Assemblée plénière des évêques de France de novembre 2019.

Les évêques de France ont pris ce matin des décisions importantes pour avancer dans les quatre processus qu’ils ont engagés depuis novembre 2018 avec la Conférence des religieux et religieuses de France (CORREF) pour mettre fin aux abus sexuels dans l’Église.

Jusqu’il y a quelques années, l’impact des abus sexuels commis par un adulte contre une personne mineure n’était pas vraiment compris. Grâce à la rencontre de personnes victimes, les évêques ont pris conscience que l’enfant ou le jeune ainsi atteint avait subi un traumatisme qu’il ne pourrait surmonter qu’au prix de grandes souffrances. Lorsque, de surcroît, l’agression sexuelle a été causée par un clerc, une double relation a été abîmée : la relation du jeune avec l’adulte dont il attendait bienveillance et aussi sa relation avec Dieu. Les personnes victimes ont souvent insisté sur ce point.

Un dispositif de reconnaissance des causes de la souffrance

Le groupe de travail CEF-CORREF piloté par Mgr Pascal Delannoy, après l’avoir travaillé avec des personnes victimes, a présenté aux évêques un dispositif de reconnaissance de la souffrance vécue par les personnes qui ont été victimes de la part de prêtres ou de diacres d’agressions sexuelles lorsqu’elles étaient mineures. Les évêques l’ont adopté.

Par ce dispositif, les évêques souhaitent manifester clairement et concrètement aux personnes qui leur ont révélé les actes de certains prêtres ou diacres, qu’ils les reconnaissent comme victimes, non seulement de l’atteinte ou de l’agression subie mais aussi du silence, de la négligence, de l’indifférence, de l’absence de réaction ou de mauvaises décisions ou de dysfonctionnements au sein de l’Église. Chaque évêque prendra l’initiative de renouer avec les personnes victimes qu’il connaît pour leur exposer comment l’Église travaille à conserver la mémoire de ce qui s’est produit, à la prévention de ces actes, aux modalités d’accompagnement des clercs coupables afin que de tels actes ne se reproduisent plus et pour offrir, aux personnes victimes, de recevoir, si elles l’acceptent, une somme d’argent unique et forfaitaire. Cette somme d’argent proposée n’est ni une indemnisation qui dépend de la justice de notre pays ou de la justice canonique ni une réparation. Elle vise à reconnaître que la souffrance des personnes victimes tient aussi à des manquements d’ordres divers au sein de l’Église. Le dispositif décidé vaudra, au long des années, pour toutes les personnes dont les évêques auront à reconnaître qu’elles ont été abusées sexuellement par un clerc étant mineures.

La place des personnes victimes dans ce travail

Les évêques expriment leur gratitude aux personnes qui participent aux groupes de travail. Ils assurent de leur grande reconnaissance les personnes victimes qui ont accepté de travailler avec les groupes et de venir jusqu’à Lourdes et ceux et celles qu’elles représentent. Ils n’oublient pas celles et ceux qui, en raison de ces faits subis ou connus, ont quitté l’Église et renoncé à y trouver quelque fraternité et même quelque vérité que ce soit.

Le rôle de la Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Eglise

Les évêques ont été impressionnés par la présentation faite par M. Jean-Marc Sauvé du travail de la CIASE. Ils sont déterminés à aider au maximum cette commission. Ils renouvellent l’appel à toutes celles et tous ceux qui auraient subi des atteintes ou des agressions sexuelles de la part de prêtres ou de diacres ou de religieux ou de religieuses à prendre contact avec la CIASE. Les évêques ont décidé la constitution d’un fonds dédié de 5 millions d’euros pour financer leurs actions de lutte contre les abus sexuels et les travaux de la CIASE.

Des travaux à poursuivre

Les groupes de travail n’ont pas fini leur tâche :

  • concernant la dimension financière du dispositif de reconnaissance des causes de la souffrance, il faut désormais ouvrir le fonds nécessaire, fixer le montant de la somme forfaitaire, appeler à abonder le fonds ;
  • concernant la mémoire, le groupe travaille à la proposition d’un geste liturgique significatif, les évêques encouragent ce groupe de travail à offrir aux personnes victimes qui le désireraient la possibilité de faire le récit de leur vie (et pas seulement des faits) et, le cas échéant, de le déposer dans un lieu mémoriel ;
  • concernant la prévention et le suivi des clercs coupables, les deux groupes ont ébauché des préconisations qu’ils doivent préciser encore.

Les évêques sont conscients que le travail doit se poursuivre. La crise des abus sexuels appelle à combattre toutes les formes d’abus, ils contredisent l’Evangile de liberté et de dignité qui fonde la mission chrétienne. La parole du Christ résonne avec force : « Celui qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dénoncées ; mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu. » (Jn 3, 20-21).

Mgr Eric de Moulins-Beaufort, Archevêque de Reims, Président de la Conférence des évêques de France

 

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